La tension dure depuis des mois et les groupes états-uniens n’arrivent pas à sortir la tête de l’eau : le gouvernement américain n’a pas choisi de proroger l’existence de l’Eximbank ou ExIm Bank (Export-Import Bank of the United States) qui avait été créée sous l’impulsion du président Franklin D. Roosevelt par le congrès américain en 1935 pour tenter de conjurer les effets de la grande dépression.
Le choc est dur, notamment pour Boeing qui est considéré comme le principal bénéficiaire de ce système bancaire à tel point que l’ExIm Bank est fréquemment appelée la Boeing Bank. Pour autant Boeing n’est pas le seul groupe a utiliser les services de l’Exim Bank lorsqu’il s’agit de vendre sur les marchés à l’exportation et dans le monde aéronautique, General Electric n’est pas en reste.
La charte qui régit l’ExIm Bank n’a pas été renouvelée le 1er juillet dernier et ce sous la pression de l’aile la plus conservatrice de la majorité républicaine du Congrès qui estime que la banque bénéficie à un petit nombre d’organismes laissant de côté tout un pan de l’industrie, notamment les PME/PMI, ce qui vaut même à certains de ces congressistes de considérer qu’elle fonctionne sous couvert de « capitalisme de copinage ». Ce qui pour eux est inadmissible lorsque l’on prend en compte que cela se fait avec de l’argent public.
Plus de 80 ans que les industriels états-uniens ont à leur disposition une banque de financement à l’export-import. C’est dire que la disparition d’un tel organisme – qui a fait des émules dans la plupart des nations au Monde – passe mal. Car pour son vice-président John Rice, le groupe GE ne peut pas se permettre d’attendre une éventuelle poursuite des activités de l’ExIm car « ses grands projets industriels nécessitent des arrangements financiers de long terme ». Et de chercher des solutions auprès de pays qui disposent d’une agence de crédit à l’exportation (ECA).
C’est d’ailleurs ce que le conglomérat a fait ces deux dernières semaines avec d’une part la France et son agence de crédit à l’exportation Coface, et d’autre part la semaine dernière avec l’UKEF (UK Export Finance) en Grande-Bretagne.
C’est d’abord en France où le grand patron Jeff Immelt s’est rendu lui-même à Paris pour entériner l’accord avec la Coface et d’où pourrait résulter la création de 400 emplois sur son site de Belfort qui viendront s’ajouter au millier de postes que GE s’est déjà engagé à créer, dans le cadre du rachat de la branche énergie d’Alstom et dont le feu vert a été donné par Bruxelles à la mi-septembre.
GE a bien l’intention d’aller plus loin puisqu’il a donc aussi signé un accord financier avec l’UKEF qui lui ouvre une ligne de crédit de 12 milliards de dollars et va lui permettre de soutenir des contrats confirmés ou potentiels sur des marchés internationaux tels que le Brésil, le Ghana, l’Inde et le Mozambique. Un accord qui pourrait déboucher sur la création de 1 000 emplois à travers le Royaume-Uni que connaît déjà bien GE pour y avoir investi plus de 21 Md$ depuis 2003. Certes tous ces investissements ne sont pas tous consacrés à l’aéronautique, mais ils auront, en plus du secteur de l’énergie, un impact retentissant. Et ce qui est réalisé en Europe ou ailleurs ne le sera pas aux Etats-Unis.
De son côté l’ancien président directeur général de Boeing, aujourd’hui président du conseil de surveillance, Jim McNerney se montre un peu moins pessimiste sur la non-reconduction du mandat de l’ExIm Bank. Et il modère les raisons pour lesquelles la décision de créer en Chine une ligne d’aménagement intérieur ainsi qu’un atelier de peinture dédiés à ses monocouloirs 737 qui pour lui relèvent plus de l’amélioration du service clients que de faire pression sur le Congrès. Fervent défenseur du maintien des activités de l’ExIm Bank, Jim McNerney explique que sa disparition constituerait un réel désavantage pour Boeing qui perdrait quelque 10 % de compétitivité face à ses concurrents lors d’appel d’offres.
Une chose est certaine, c’est que d’un côté ou de l’autre de l’Atlantique, du côté des pays occidentaux ou de l’Europe orientale ou de l’Asie, aucun grand groupe ne peut porter seul des projets internationaux sans avoir une sérieuse caution financière.
Nicole Beauclair pour AeroMorning
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