Un millier de missiles Patriot seront produits en Europe
L’Agence OTAN de soutien et d’acquisition (NSPA) a annoncé qu’elle soutiendrait une coalition de pays, dont l’Allemagne, les Pays-Bas, la Roumanie et l’Espagne, par le biais d’un contrat portant sur la production en Europe d’un maximum de 1 000 missiles Patriot (si toutes les options sont exercées) dans la version Guidance Enhanced Missiles (GEM-T) réservée aux clients étrangers, avec la capacité d’intercepter également des missiles balistiques tactiques.
Comme l’indique la note de la NSPA, « le contrat comprend la qualification des composants mis à niveau, l’ajout de nouveaux fournisseurs, d’équipements d’essai et de pièces de rechange pour assurer le soutien futur ». On s’attend à ce que d’autres pays utilisateurs bénéficient également des termes du contrat », dont la valeur est estimée à 5,5 milliards de dollars (le coût de chaque Patriot est estimé à environ 3,7 millions d’euros). L’Agence a attribué un contrat de production et de livraison à COMLOG, une coentreprise à parts égales entre l’entreprise américaine RTX (Raytheon) et MBDA Allemagne, qui développera la production en Allemagne et en Europe des missiles Patriot GEM-T. COMLOG GmbH, fondée en 1987, est responsable du soutien logistique des missiles Patriot PAC-2 en service en Allemagne et dans d’autres pays européens (ainsi que dans les forces américaines en Europe).
Elle a assuré la maintenance de plus de 5 000 missiles PAC-2 au fil des ans au Patriot Missile Facility 3 (PMF-3), situé à Schrobenhausen, en Allemagne. Selon Thomas Gottschild, directeur général de MBDA Allemagne, « ce contrat renforce les capacités industrielles et militaires en Europe. Le volume de la commande permettra à MBDA d’établir une installation de production de missiles Patriot en Allemagne, ainsi que la production de sous-composants importants. L’usine de COMLOG est actuellement la seule de ce type pour le missile Patriot en dehors des États-Unis. Dans l’ensemble, ce contrat soutient les États européens utilisateurs de Patriot, crée des emplois en Allemagne et renforce la chaîne d’approvisionnement en munitions ».
Pour Stacy A. Cummings, directeur général de la NSPA,. « ce contrat démontre que la NSPA, en tant que principal facilitateur de l’Alliance, peut fournir avec succès des solutions multinationales rentables aux nations tout en renforçant les capacités industrielles européennes. Grâce à une étroite coopération euro-atlantique entre les alliés et l’industrie, la NSPA a permis de consolider les besoins par l’attribution de ce contrat complexe. Les pays clients ont réalisé des économies d’échelle, réduit leur empreinte logistique et obtenu des solutions et un soutien compétents dans un cadre juridique clé en main éprouvé”. Thomas Laliberty, président de Land & Air Defense Systems chez Raytheon, a déclaré: « Raytheon et MBDA se sont associés à la NSPA, à l’armée américaine et à un vaste réseau de fournisseurs dans la région pour proposer à nos partenaires européens un programme GEM-T qui accroît la capacité de l’OTAN en matière de missiles de défense aérienne, renforce sa dissuasion et soutient l’état de préparation opérationnelle des systèmes de défense aérienne Patriot dans toute l’Europe. Cette acquisition conjointe renforce la coopération entre les alliés européens des systèmes Patriot ». Le secrétaire général de l’Alliance, Jens Stoltenberg, a salué « l’annonce opportune d’un investissement dans un maximum de 1 000 nouveaux missiles de défense aérienne Patriot afin de renforcer la sécurité de l’Alliance« .
Les attaques de missiles et de drones russes contre des civils, des villes et des villages ukrainiens montrent l’importance des défenses aériennes modernes. L’augmentation de la production de munitions est cruciale pour la sécurité de l’Ukraine et la nôtre. « Grâce à ce contrat, la NSPA permet aux pays utilisateurs de Patriot de bénéficier d’avantages significatifs« , peut-on lire dans la note de l’agence de l’OTAN. « Le contrat multinational bien établi, dans l’esprit de l’initiative européenne de bouclier aérien (ESSI), permet de réaliser des économies d’échelle et de soutenir l’expansion de la capacité de production des nouveaux missiles GEM-T pour répondre à la demande croissante.
La nouvelle capacité de production de missiles GEM-T en Europe renforce la sécurité de l’approvisionnement et contribuera à la reconstitution des stocks de missiles Patriot. Cette initiative témoigne de la forte coopération entre les alliés de Patriot dans le cadre de l’ESSI ». L’ESSI, créée le 13 octobre 2022 à Berlin, rassemble plusieurs pays de l’OTAN (dont l’Italie et la France, qui produisent le système de missiles SAMP/T avec des missiles Aster 30) autour de la structure intégrée de défense aérienne et antimissile développée par l’Allemagne et basée sur la triade de systèmes IRIS-T (allemand), Patriot (américain) et Arrow 3 (israélien).
Cet arrangement mettrait sérieusement en péril l’axe militaro-industriel franco-allemand et les possibilités de développer en Europe des capacités globales de défense aérienne de conception et de production continentales. L’Allemagne s’est maintenant désengagée de nombreux programmes européens en coopération avec Paris pour se concentrer sur les produits américains, de l’évolution de l’hélicoptère de combat Tigre 3 (auquel Berlin a préféré l’Apache américain) aux hélicoptères Boeing Chinook CH-47F, en passant par les avions de patrouille maritime Boeing P-8 Poseidon et l’avion de combat F-35A de Lockheed Martin. L’industrie allemande de la défense cherche également à augmenter ses capacités de production, comme l’a révélé le 3 janvier une enquête du journal Handelsblatt, rapportée en Italie par Agenzia Nova. Krauss-Maffei Wegmann (KMW) et Rheinmetall ont pour objectif de produire 100 chars par an, tandis que Diehl entend tripler le nombre de systèmes de défense antiaérienne IRIS-T. Rheinmetall et Diehl visent à augmenter la production d’obus d’artillerie de 100 000 actuellement à environ 250 000 par an afin de réapprovisionner de nombreuses forces armées européennes (allemandes en tête) en armes et munitions fournies à l’Ukraine au cours des deux dernières années. Fabio Gigante pour AeroMorning