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La fiabilité des très gros moteurs d’avion

La Chronique Aeromorning de Michel Polacco
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www.aeromorning.com   Novembre 2020 -1

Le BEA, Bureau d’Enquêtes et d’Analyses français pour l’aviation civile (il existe un BEA-D pour les aéronefs de la défense et de l’Etat) a publié le mois dernier le rapport final sur la destruction en vol non contenue, donc un accident, du moteur numéro 4 de l’Airbus A380 d’Air France F-HPJE, le 30 septembre 2017 au dessus du Groenland. Accident, car c’est ainsi que le BEA a classé cet évènement, car tout le fan du moteur s’est brisé et détaché, une partie des débris a légèrement endommagé l’avion, heureusement peu, mais, à l’altitude élevée où il se déplaçait, il s’en est fallu de peu qu’il subisse des dégâts catastrophiques. Comme on s’en souvient, l’affaire n’a provoqué aucun blessé, l’avion, piloté avec maîtrise par son équipage de 2 pilotes +1 est parvenu à se poser au Canada, à Goose Bay, terrain jugé le plus approprié pour ce dérouté avec des dégâts impossibles à évaluer en vol. Ce n’est qu’en juillet 2019, au cours de la troisième phase de recherches dans les glaces du territoire Danois, qu’il a été possible de récupérer puis rapatrier une part du moyeu de soufflante chez le motoriste Pratt et Whitney, partenaire du groupe Engine Alliance, producteur du moteur GP7270 avec General Electric.

Jusque là, on se confondait dans les hypothèses. Comment tout l’avant d’un moteur avait-il pu se séparer en vol, l’axe se rompre, malgré les très nombreux contrôles auquel les pièces sont soumises. Malgré l’expérience acquise depuis des décennies. Malgré la qualité extraordinaire des matériaux et en particulier du Titane utilisé pour les pièces les plus sensibles. Peu après l’accident, quels débris avaient pu être récupérés dans la neige profonde. Mais ceux expulsés au loin de la position évaluée de l’avion étaient bien plus difficiles, voire impossibles à localiser. Rien dans les débris ramassés dans les semaines qui ont suivi l’évènement n’apportait d’explication. Et pourtant, 200 avions A380, donc 800 moteurs volaient ! Fallait-il clouer les appareils au sol, se satisfaire d’inspections supplémentaires ? Estimer que c’était et resterait un cas isolé ?

Il a été décidé d’inspecter les moteurs à fond, de rechercher toute trace de criques, de rapprocher les inspections, en attendant une explication rationnelle. Et les A380 ont poursuivi leurs vols… Jusqu’au Covid19, où les très gros porteurs ont presque tous été cloués au sol, et le demeurent pendant cette seconde vague de pandémie.

Deux fois déjà les bureaux d’enquêtes ont été confronté à de semblables énigmes. Mais les deux fois précédentes, il a été aisé de retrouver les éléments critiques responsables. Même si l’analyse est restée complexe.

Par exemple, cas numéro 1 : l’écrasement d’un Boeing B777 de British Airways en approche finale à Londres Heathrow, piste 27L le 17 janvier 2008. L’appareil arrivait de Pékin et il  n’était pas en panne de carburant. Pourtant les deux moteurs Rolls-Royce ont cessé simultanément de fournir la puissance demandée. L’avion a terminé sa course en vol plané et touché le sol à 300 mètres de l’entrée de piste, puis a glissé en se dégradant sérieusement. Il n’y a pas eu d’incendie heureusement, et pas de victimes. Mais l’appareil quasi neuf, il avait 6 ans, n’a pas pu être réparé. L’enquête a duré deux ans. Elle a confirmé un blocage du débit de carburant vers les deux moteurs. Comment expliquer un tel phénomène simultané ? En fait il a été démontré qu’un givrage du carburant pendant une longue période de ralenti se serait produit sur les deux moteurs lors de la descente. Ce phénomène n’avait pas été suffisamment anticipé lors de la certification de l’avion. Typique de moteurs géants, parmi les plus gros du monde avec le GE90, et circonstances exceptionnelles ce jour là dans la procédure d’approche et les températures extérieures et celle du carburant. Bien sûr, les remèdes qui s’imposent ont été mis en œuvre dès que les enquêteurs ont compris la chose. Deux ans.

Cas numéro 2, le 4 novembre 2010 sur le vol Qantas QF32. Un Airbus A380 immatriculé VH-OQA, allant de Singapour à Sydney. Cette fois-ci peu après le décollage, survolant à 2500 mètres d’altitude Batam en Indonésie, une double détonation a été entendue. Puis une alarme sur le moteur numéro 2, soit le moteur gauche le plus proche du fuselage. Puis de nombreux systèmes ont cessé de fonctionner. Un contrôleur Indonésien a signalé peu après que des morceaux d’avion avaient été retrouvés au sol. L’équipage a pu constater une brèche sur la nacelle du moteur, mais aussi des dégâts sur les ailes et le fuselage. Ainsi il s’est agi d’une panne moteur non confinée, contrairement à la règle de certification. Après presque une heure de procédures mesurées et complexes, l’équipage exceptionnellement composé de 5 navigants techniques a pu reposer l’avion à Singapour, et évacuer les passager dès arrêté sur le macadam. Là également pas de victimes, mais une évacuation rocambolesque avec l’un des moteurs qu’il était impossible de stopper !

Que s’est-il passé ? L’appareil était équipé de moteurs Rolls-Royce Trent-900, éprouvés, certifiés comme devant contenir toute projection d’éléments en cas d’implosion. Et pourtant, des quantités de débris ont provoqué de graves dégâts, mutilant l’avion. Qui sait si un autre modèle d’appareil que l’A380 aurait survécu à cela ? Et surtout si l’évènement s’était produit à haute altitude lorsque la cellule est fortement pressurisée. Le rapport final a été publié près de 3 ans après. Entre temps bien sur de nombreuses recommandations ont été faites en matière de contrôle périodiques. L’enquête a montré deux causes principales : un défaut de qualité non détecté ni pris en compte lors de la fabrication du moteur, et le mauvais positionnement occurrent de deux conduites d’huile très chaude et sous pression, ce qui n’avait pas été envisagé lors de la  conception.

Ainsi, lors de « l’accident » du A380 d’Air France au-dessus du Groenland, les études n’ont pas mis en cause de faute de conception, mais, et c’est la grande qualité de l’enquête et de l’analyse du BEA, elle a fait avancer la science des métaux. En effet, l’analyse fine des éléments retenant les aubes du fan a montré des défauts non détectables dans la structure du titane que l’on pensait bien connaitre. Et les contrôles réguliers prescrits ne pouvaient pas montrer ces défauts. Je cite le rapport.

Parmi les facteurs susceptibles d’avoir contribué à l’accident figurent :

  • une méconnaissance du phénomène de fatigue-dwell* sur l’alliage de titane Ti-6-4 par le concepteur/constructeur du moteur ;
  • l’absence de consignes relatives à la prise en compte des macro-zones (i.e. des colonies de grains alpha orientés de façon similaire) et du phénomène de fatigue dwell* dans les pièces critiques des moteurs, par les organismes de certification lors de la démonstration de conformité ;
  • l’absence de moyen de détection non-destructif de la présence de macro-zone inhabituelle dans les pièces en alliage de titane ;
  • une augmentation du risque de présence de macro-zones de taille et d’intensité importante dans les forgés en Ti-6-4 de grande taille du fait de l’augmentation de la taille des moteurs et notamment de leur soufflante.

Traduit en langage moins technique : l’alliage de titane Ti-6-4 utilisé, subit un processus de fabrication qui est susceptible d’entraîner la présence de macro- les zones et pour lesquelles le risque de défaillance dû à un phénomène de *fatigue par temps froid n’a pas été suffisamment pris en compte lors de la certification.

Après l’accident, des inspections régulières de la flotte en service ont permis de s’assurer de l’absence de fissure détectable dans les zones jugées à risque sur les moyeux de soufflante des moteurs Engine Alliance équipant les A380. Des réflexions impliquant les organismes de certification et les motoristes sont en cours afin de mieux comprendre le phénomène de fatigue-dwell* et de mieux le prendre en compte dans la conception des futurs moteurs.

On ne se doutait pas de cela, et désormais sur les moteurs de très forte puissance les parties en Titane sont particulièrement surveillées. Heureusement, cette fois encore, l’apprentissage s’est fait sans victimes. Cela montre que les études et calculs les plus savants au moyen de dispositifs informatisés extrêmement modernes, y compris chez les plus expérimentés des industriels, laissent place a des inconnues, et donc à des dangers. Le risque zéro n’existe pas là non plus et nous avons encore et toujours à apprendre de l’expérience en situation réelle ! Mais pour l’heure de plus en plus de très gros porteurs sont cloués au sol. Covid19 oblige. Hélas.

Michel Polacco

Aviation Safety :

https://aviation-safety.net/database/record.php?id=20080117-0

https://aviation-safety.net/database/record.php?id=20170930-1

https://aviation-safety.net/database/record.php?id=20101104-1

BEA :

https://www.bea.aero/les-enquetes/evenements-notifies/detail/accident-de-lairbus-a380-861-immatricule-f-hpje-et-exploite-par-air-france-survenu-le-30-09-2017-en-croisiere-au-dessus-du-groenland-enquete-deleguee-au-bea-par-les-autorites-du-danemark/