Le grand projet européen de Système de Combat Aérien Futur, le SCAF, est très ambitieux. Hélas quelques nuages apparaissent dans son environnement. Début octobre le PDG de Dassault Aviation Eric Trappier et le président exécutif d’Airbus Defence and Space, Dirk Hoke ont publié un communiqué cinglant appelant à lancer « sans plus attendre les études menant à la conception d’un démonstrateur, étape clef pour mettre cet ambitieux projet en marche». Les commandes de développement prévues semblent effectivement tarder et les industriels s’inquiètent. Le démonstrateur est à ce jour programmé pour 2026 ! Si la « machine » s’enraye, ils ne pourront au minimum pas tenir les délais, les coûts vont croître, et qui sait, les programmes seront abandonnés ou amoindris.
le SCAF, le Système de Combat Aérien Futur prévoit depuis 2017 et pour 2040, en coopération de fond entre la France et l’Allemagne, c’est-à-dire entre Dassault Aviation et Airbus Defence and Space, (après le FCAS, Futur combat Aircraft avec les britanniques) un dispositif combinant un avion de combat de 6° génération, le NGA ou New Generation Aircraft, habité et piloté du bord, successeur du Rafale et de l’Eurofighter, un drone de combat, probablement calqué sur le nEUROn de Dassault Aviation (avec l’Italien Leonardo, la Suède, la Grèce et l’Espagne au travers d’Airbus Defence & Space) et les différents systèmes de communication, de renseignement et de calcul, incluant de « l’Intelligence Artificielle », ainsi que différentes catégories de drones et missiles. Et il faut associer les industriels spécialistes des moteurs, des radars, etc. Bien sûr le SCAF inclut les liens nécessaires avec les forces terrestres et navales. Tout cela donnant à l’Europe une capacité aérienne de combat autonome.
Ainsi, même à dimension européenne, ce programme est gigantesque. Il court sur plus de 20 années, avoisine les 60 milliards d’euros et repose sur la solidité de départ de l’entente franco-allemande. Pourtant, et déjà, sur le projet de coopération franco-allemand EURODRONE bien plus rapproché (2025) des difficultés semblent poindre. Français et allemands, en l’occurrence également Dassault Aviation avec Airbus Defence & Space (associés à l’italien Leonardo) se sont mis d’accord pour développer un drone « MALE » (Moyenne Altitude Longue Endurance), afin de plus dépendre des Etats-Unis et d’Israël, qui sont les leaders mondiaux, comme c’est le cas avec les « Reaper », particulièrement utilisés au Mali, (et peu avant avec les Harfang). Ainsi, l’Europe construit un projet lui permettant de regagner son indépendance dans le paysage complexe de la diplomatie et des alliances contemporaines. Mais les allemands semblent dévier du plan initial. Ils souhaitent un appareil bimoteur, donc plus lourd (11 tonnes contre 4,5 pour le Reaper US), et donc bien plus cher ce qui heurte les gouvernements. L’EURODRONE serait utilisable en sécurité en Europe dans les zones habitées, tandis que les français cherchent un appareil adapté aux opérations extérieures et visent la en priorité la meilleure économie. Ainsi l’EURODRONE traine ! Et les relations entre français et allemands, industrielles, voire politiques, pourraient en pâtir. On le sait tous les programmes qui traînent coutent très cher. Mais on sait également que nos industriels ont un besoin vital de conserver et d’accroitre leur savoir faire et par delà de maintenir leurs équipes et leurs outils de production. Faute de quoi, ce sont nos nations, et l’Europe, qui perdront durablement leur autonomie. C’est donc stratégique en tout point.