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L’avionneur franco-italien dans les starting blocks

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L’attente est interminable : le constructeur franco-italien ATR est prêt à lancer le développement d’un nouvel avion régional à 90 places, qui pourrait s’appeler l’ATR 92, mais ses deux actionnaires, EADS et Finmeccanica, hésitent à franchir le Rubicon. L’investissement à prendre en compte, inférieur à 2 milliards d’euros, n’est pourtant pas dissuasif, les obstacles étant ailleurs. A commencer par la charge de travail considérable qui interdit provisoirement d’en demander davantage au bureau d’études Airbus, en première ligne dans ce dossier.
Les versions successives du nouveau long-courrier A350XWB (qui volera dans environ 5 mois), les soucis structuraux récents de l’A380, la fin difficile de mise au point de l’A400M, la préparation de l’A320 NEO remotorisé, font que les ingénieurs de Saint-Martin-du-Touch sont au taquet. Sauf à considérer l’ATR 92 comme prioritaire, ce qui n’est visiblement pas le cas, la patience est plus que jamais de rigueur. Mise à part l’hypothèse qui voudrait que le concurrent canadien, Bombardier, choisisse de tirer le premier et de brusquer les événements. Ou encore que le coup d’envoi soit donné par l’industrie chinoise, qui serait proche du lancement du MA700, similaire, mais pas nécessairement en mesure de jouer dans la même catégorie.
S’il est impatient de passer à l’action, Filippo Bagnato, directeur général d’ATR, cache parfaitement son jeu. Avare en commentaires, il se contente d’évoquer un marché global de 3.400 biturbopropulseurs de 50 à 90 places pour les 20 prochaines années. Une manière de rappeler qu’ATR a tout l’avenir devant lui. Entre-temps, les commentaires vont bon train : le nouvel avion pourrait-il être lancé avant la fin de l’année ? En 2014 ?
Le mot magique sans cesse répété, à Saint-Martin-du-Touch, où est implantée la chaîne d’assemblage final d’ATR, est tout simplement «ramp-up», montée en cadence en français. Il s’agit en effet de bientôt livrer huit avions par mois, sachant que 221 appareils figurent actuellement dans le carnet de commandes. Cette année, ATR prévoit de livrer 80 avions, 90 l’année prochaine, à comparer à 64 l’année dernière et un et demi par mois à peine en 2005. La chaîne fonctionne dorénavant 7 jours sur 7.
Ici, le défi posé par le ramp-up est le même que chez Airbus pour l’A320 et Boeing pour le 737 : il s’agit de produire plus, plus vite, sans étrangler les fournisseurs. Lesquels éprouvent toutes les peines du monde à suivre le rythme sans précédent qui leur est demandé. D’où l’obligation d’agir avec prudence et de ne surtout pas demander l’impossible aux uns et aux autres. Une situation qui apparaît très tendue en France, moins en Italie, à en croire Thierry Casale, directeur des Opérations.
L’envolée d’ATR, confortée par le prix durablement élevé du pétrole, confirme que rien n’est jamais définitivement acquis. On a tout d’abord observé au fil des années une pléthore de concurrents sur un marché que l’on croyait en grand danger de saturation, analyse qui a conduit au renoncement plus ou moins spontané de Saab, Fokker, Fairchild Dornier. La «jetmania» a fait le reste, les voyageurs, même lorsqu’il s’agissait de couvrir des étapes courtes, préférant le «vrai» jet à l’avion à hélices. Lequel, autrement plus moderne qu’il n’y paraît à première vue, a finalement pris sa revanche.
Tous les préjugés n’ont pas disparu pour autant. Ainsi, même en phase de forte croissance, ATR conserve à tort une image de grosse PME alors que plus de 4.000 personnes sont nécessaires à sa bonne marche. Mais elles sont pour la plupart occupées par Airbus Operations et Alenia Aermacchi et, de ce fait, noyées dans les statistiques. En réalité, petit ATR est devenu grand. Et le sera encore plus quand il commencera à produire l’ATR 92.
Pierre Sparaco – AeroMorning

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