Le sismomètre SEIS de la mission InSight, déployé sur le sol martien par un bras automatique le 19 décembre 2018, a été testé avec succès le 1er janvier 2019.
Pour la première fois dans l’histoire de l’exploration spatiale, un sismomètre planétaire fonctionne sur le sol de la planète Mars. SEIS (Seismic Experiment for Interior Structure), dont la responsabilité technique et scientifique est française, a été déployé sur le sol martien par l’atterrisseur de la mission InSight le 19 décembre 2018. Il a été testé le 1er janvier et fonctionne normalement.
C’est un moment historique et un espoir incroyable pour la géophysique. Les deux missions américaines Viking 1 et 2, lancées en 1975 par la NASA, embarquaient chacune un sismomètre. Si l’un n’a pu fonctionner, le second, installé sur le pont de l’atterrisseur n’a pas pu mesurer l’activité sismique de Mars car trop sensible au bruit de l’atterrisseur dans le vent martien. SEIS est le premier à être ainsi déposé au plus près du sol martien.
Il faut remonter à 46 ans pour retrouver le déploiement d’un instrument analogue sur le sol d’un autre astre que la Terre : en décembre 1972 l’astronaute et géophysicien américain Harrison Schmitt avait déployé sur la Lune le gravimètre ALSEP lors de la mission Apollo 17.
L’objectif poursuivi par la sismologie planétaire est de connaître la structure et la composition interne de la planète : taille et nature du noyau, du manteau et de la croûte. SEIS va donc pouvoir être à l’affut des « tremblements de Mars » et les impacts météoritiques pour visualiser son intérieur et déterminer l’origine des sources sismiques. Ces données fourniront des informations capitales pour comprendre comment Mars et les planètes rocheuses en général, se forment et évoluent.
SEIS a été déposé sur le sol martien par le bras automatique d’InSight et les premières opérations ont consisté à libérer le grappin qui l’avait déposé, prendre des photos sous tous les angles pour vérifier que tout était normal et allumer des réchauffeurs pour que SEIS n’ait pas trop froid car il n’est pas encore protégé par son bouclier de protection. Le câble électrique a été libéré deux jours plus tard, puis désolidarisé le 6 janvier, pour réduire la transmission des vibrations de l’atterrisseur.
Les trois capteurs large bande (VBB de l’IPGP/Sodern/CNES) qui constituent le cœur de SEIS, enfermés dans leur sphère de titane où règne un vide poussé, ont maintenant été recentrés et commencent à enregistrer les faibles déplacements du sol. Ils sont tous les trois fonctionnels, comme les capteurs britanniques à courtes périodes et ont d’ores et déjà montré que le sol de Mars est, lorsque le vent est faible, plus stable que dans les meilleures caves sismiques terrestres.
L’installation de SEIS n’est pas pour autant terminée car il reste à déployer le WTS (Wind and Thermal Shield), le bouclier de protection contre le vent et les variations thermiques. C’est un large dôme blanc qui recouvrira SEIS sans le toucher, équipé de trois pieds et d’une jupe de protection en cotte de maille, qui épousera parfaitement le relief du sol pour permettre à SEIS de travailler dans une plage de variation thermique moins contraignante que s’il était resté exposé au rude climat martien. Cette dernière opération est aujourd’hui prévue pour la deuxième quinzaine de janvier. SEIS sera alors en configuration finale pour écouter battre le cœur de Mars et nous révéler, séisme après séisme, son intérieur.
Le CNES est le maître d’œuvre de SEIS et l’IPGP en assure la responsabilité scientifique. L’IPGP a conçu les capteurs large bande VBB qui ont été fabriqués par la société Sodern, puis les a testés avant leur livraison au CNES. Des chercheurs et ingénieurs de l’IPGP, de l’Université Paris Diderot, de l’ISAE-SUPAERO et du CNRS (LPG de Nantes et du LMD) complètent l’équipe française actuellement au JPL pour analyser les premières données de SEIS. Le CNES finance les contributions françaises, coordonne le consortium international (*) et a été responsable de l’intégration, des tests et de la fourniture de l’instrument complet à la NASA.
(*) en collaboration avec le JPL, l’École polytechnique fédérale de Zurich (ETHZ, Suisse), l’Institut Max Planck de Recherche du Système solaire (MPS, Göttingen, Allemagne), l’Imperial College de Londres et l’université d’Oxford ont fourni les sous-systèmes de SEIS.