Est-il pensable que Boeing et son partenaire Lockheed Martin renoncent sans broncher à un contrat de 80 milliards de dollars ? Probablement pas lorsqu’on analyse la situation et la prise de position des deux partenaires américains qui avaient, tout comme leur compatriote Northrop Grumman, répondu à l’appel d’offre du Pentagone pour doter l’US Air Force d’un bombardier LRS à long rayon d’action (Long Range Strike-Bomber) de nouvelle génération.
Et cette fois, c’est Northrop Grumman qui a remporté le contrat du Bombardier LRS qui en euros représente la somme rondelette de 72,45 milliards.
Reste que pour atteindre cette somme, il faudra que l’US Air Force commande effectivement les 100 exemplaires qui ont servi de base pour calculer le montant du contrat. Or, comme c’est d’usage, pour l’instant il s’agit d’une première tranche de 21 appareils pour un montant de 21,4 Md$ aux conditions économiques de 2010.
Aux conditions économiques de 2010 car c’est la seconde fois que l’initiative est prise de remplacer les 76 B-52 (qui ont tous plus de 50 ans), les 66 B-1 (dont le dernier a été construit en 1988) et les 19 B-2 furtifs qui constituent la flotte des bombardiers américains. La première tentative avait été annulée en 2010 car jugée trop ambitieuse et trop coûteuse par le secrétaire à la défense d’alors, rappelle l’agence Reuters.
La question se pose dorénavant de l’avenir pas tant de Lockheed Martin qui a encore dans son escarcelle la fabrication des très coûteux F-35 et F-16 que pour Boeing qui en terme d’avions de combat n’a pas d’horizon devant lui, si ce n’est quelques queues de contrats portant sur les F-18 et F-15. Certes il détient le contrat du KC-46A remporté au nez et à la barbe d’Airbus Group, mais s’il y a des développements spécifiques sur cet appareil (la perche de ravitaillement en vol notamment, des logiciels de bord …) il a repris comme bases celles de la version cargo du Boeing 767.
Alors on peut imaginer que Boeing, avec ou sans Lockheed Martin, va se tourner vers l’administration américaine pour lui demander d’expliciter son choix car au vu des contraintes budgétaires actuelles et des enjeux financiers ce sont les activités militaires de Boeing qui vont connaître un véritable chamboulement pour plusieurs décennies. Voire disparaître.
Ainsi, au gré de ce contrat, ce sont les grandes lignes d’une nouvelle étape dans la restructuration de l’industrie de Défense américaine qui se profile. Reste que Boeing, avec ou sans Lockheed Martin dispose de 100 jours à partir de ce vendredi pour faire appel de la décision, comme il l’a fait il n’y a pas si longtemps pour le contrat du ravitailleur. Bis repetita ?
En attendant que sait-on de ce futur Bombardier LRS-Bomber ? Quasiment rien. Lors d’une réunion journalistique début novembre, le secrétaire adjoint du service achats de l’US Air Force au Pentagone a confirmé que « les capacités et les spécification de l’appareil resteraient classifiées pour de longues années. De telle manière à ce que des adversaires (sur le terrain géopolitique s’entend) ne puissent pas développer une antidote. »
Il sera furtif et sera doté de la capacité nucléaire. Northrop Grumman a-t-il voulu tromper son monde en faisant apparaître une aile volante voilée lors d’une publicité très remarquée il y a quelques mois durant le dernier Super Bowl ? C’est bien entendu ce qui vient à l’esprit dès lors que l’on parle de furtivité. A l’heure où toute l’industrie aéronautique parle de saut technologique, Northrop Grumman aurait-il développé de nouveaux concepts que justement l’Amérique veut garder secrets ?
Furtif, porteur de l’arme nucléaire, pilote à bord … mais il existerait une option pour le convertir dans l’avenir en un avion piloté du sol pour le transformer en UCAV ou drone de combat. Or Northrop Grumman a déjà donné la preuve des ses compétences dans ce domaine notamment avec le drone de surveillance Global Hawk RQ-4 tout autant qu’avec son drone furtif RQ-180.
Seul l’avenir le dira. Mais pour garder le secret, rien non plus ne sera révélé quant aux industriels qui constitueront la chaîne des fournisseurs de cet appareil, ils seront tenus secrets sinon au secret.
Nicole Beauclair pour AeroMorning
Pour le LRS-Bomber, Northrop Grumman va t-il dépasser le stade technologique qu’il avait atteint avec le B-2 déjà furtif ?
Crédit : Northrop Grumman
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