Revendication – Les avions de combat de l’avenir n’auront pas de pilote.
Dans un peu moins de trois ans, les Bouches-du-Rhône seront régulièrement survolées par un curieux appareil rappelant, à une autre échelle, le bombardier stratégique américain B-2. Une silhouette élégante, originale, appelée à sillonner le ciel de Provence tout simplement parce que c’est à Istres que se trouve le Centre militaire d’essais en vol.
En cas de survol suffisamment bas, à l’aide de bonnes jumelles, sans doute l’observateur curieux remarquera-t-il l’absence de cockpit. Normal puisqu’il s’agira du Neuron, avion sans pilote, UAV pour les spécialistes, c’est-à-dire Unmanned Aerial Vehicle. Une appellation barbare qui laisse supposer que les avions de combat de l’avenir, de reconnaissance, seront un jour remplacés par des «véhicules». Il va falloir réviser nos classiques.
Lesdits véhicules se passeront de pilote, commandés du sol ou entièrement automatiques, pas de géant vers l’efficacité opérationnelle absolue et l’espoir de combats sans victimes. Au pire, l’ennemi parviendra à abattre une merveille technologique et son équipage, sans doute très déçu, quittera aussitôt son poste de travail pour un moment de détente devant la machine à café de sa base.
Il y a longtemps que les UAV se sont installés, incrustés, dans les programmes de Défense.
Certains sont miniaturisés dans des proportions telles qu’ils sont capables, comme des insectes, de passer sous une porte. D’autres sont des avions à part entière capables de toutes les missions. De là à imaginer que les «pilotes» qui succèderont dans 20 ans aux vrais équipages seront des ingénieurs-bureaucrates, il n’y a plus qu’un pas à franchir.
Dassault Aviation vient de confirmer que son UAV Neuron effectuera son premier vol fin 2011. Il bénéficie d’ores et déjà de l’expérience acquise par le démonstrateur technologique AVE propulsé par un turboréacteur Rolls-Royce/Turbomeca Adour. L’AVE est capable de décoller et atterrir automatiquement, il est furtif sinon invisible, et se prête à toutes les applications opérationnelles.
Déjà, il est souhaitable d’oublier l’acronyme UAV au profit d’UAS, Unmanned Air System, pour mieux illustrer le fonctionnement en réseau d’un ensemble complexe dont le véhicule aérien ne sera que l’élément le plus visible.
Le Neuron (chez Dassault, on écrit nEUROn) s’inscrit dans un cadre européen. La maîtrise d’œuvre est française mais cinq autres pays participent au développement, Espagne, Grèce, Italie, Suède et Suisse.
Parallèlement, Dassault, Thales et Indra mettent au point un véhicule sans pilote «Medium-Altitude Long-Endurance», MALE, avec la coopération d’Israel Aerospace Industries. Il s’agit d’un appareil de surveillance et de reconnaissance capable de missions d’une durée de plus de 12 heures, gros comme un «vrai» avion, doté d’un puissant radar à imagerie, de capteurs, de systèmes d’écoute électromagnétiques. Bref, le parfait James Bond aérien du XXIe siècle.
Plusieurs remarques viennent à l’esprit en évoquant ces programmes.
La première est qu’il est urgent de se familiariser avec des appellations, sigles et autres acronymes dépourvus de charme, certes, mais qui sont en train d’envahir l’actualité. Ensuite, il convient de dire aux pilotes de Rafale qu’ils ont beaucoup de chance de ne pas être nés 20 ans plus tard : ils n’auraient jamais quitté le plancher des vaches.
Les pilotes civils peuvent, eux, dormir en paix. Il serait d’ores et déjà possible de concevoir des Airbus et Boeing dotés de cockpits à équipage zéro. Les problèmes de fatigue, de vigilance seraient oubliés, les syndicats de pilotes disparaîtraient.
S’il est hors de question de prendre cette direction, c’est tout simplement parce que, nous autres passagers, ne voulons en aucun cas en entendre parler. Tout au contraire, nous exigeons de voyager sous la responsabilité de pilotes en chair et en os, de préférence du calibre de Sully Sullenberger. L’année dernière, nous avons été 2,29 milliards à prendre l’avion et nous sommes aussi 2,29 milliards à afficher la même revendication !
Pierre Sparaco – AeroMorning
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