Le satellite franco-américain SWOT, lancé le 16 décembre 2022, délivre depuis plus d’un an et demi des mesures d’élévation de la surface de l’eau sur l’ensemble de la planète d’une qualité exceptionnelle. Une étape importante a été franchie récemment avec la fin de la phase de validation du satellite, décrétée à l’occasion d’une rencontre entre les équipes du CNES et de la NASA et de l’équipe scientifique internationale. Ce jalon important ouvre la voie à la diffusion des données scientifiques validées.
Mission conjointe entre les Etats-Unis et la France, avec des contributions de l’Agence spatiale canadienne (CSA) et de l’Agence spatiale britannique, SWOT permet de mesurer la quasi-totalité des eaux à la surface du globe, fournissant ainsi pour la première fois une cartographie à haute résolution des ressources en eau de notre planète. En effet, SWOT effectue des mesures interférométriques à grande échelle et permet une compréhension très précise de l’élévation des océans avec une localisation de 250 m, ainsi que de tous les cours d’eau de largeur supérieure à 100 m et les plans d’eau d’une superficie d’au moins 1 hectare, avec une période de revisite de 21 jours. Les données issues de SWOT s’inscrivent dans le cadre de plus de 30 ans de progrès continus menés par les scientifiques dans le domaine de l’altimétrie, et sont l’aboutissement de plusieurs décennies de coopération spatiale franco-américaine.
Grâce à son interféromètre radar nommé KaRIn, la mission SWOT mesure pour la première fois à l’échelle du globe la hauteur d’eau et l’étendue de millions de plans d’eau tels que les lacs, les zones humides ainsi que les réservoirs[1]. Par exemple, le lac de Montbel, mis en eau en 1985 entre l’Ariège et l’Aude fait partie des nombreux réservoirs exploités en France. Les données que la mission SWOT y a acquis illustrent parfaitement sa capacité à fournir de façon régulière des informations sur l’évolution du niveau d’eau. Ce suivi global de l’eau douce à la surface des continents permet de collecter des données sur l’état du stock d’eau y compris dans des lieux difficiles d’accès, où les mesures in situ ne peuvent être réalisées, telles que les zones humides[2]. Cette vision globale offre aux scientifiques de nouvelles informations sur le cycle de l’eau et permet d’améliorer les modèles de prévisions hydrologiques (notamment les prévisions des crues) et de l’évolution du climat. Elle apporte aussi des informations cruciales aux pouvoirs publics au travers de nombreuses applications telles que la gestion de la ressource en eau potable, la production hydroélectrique ou encore l’irrigation pour l’agriculture.
Dans le domaine océanographique, SWOT est capable de détecter des tourbillons dix fois plus petits que ses prédécesseurs. Au large des Etats-Unis, dans le courant du Gulf Stream, SWOT nous livre l’observation de deux tourbillons, en rouge en haut et en bleu en bas, de 30 à 50 kilomètres de diamètre chacun (voir photo jointe). Entre les deux, plusieurs tourbillons de quelques kilomètres seulement sont observés : des données inédites acquises lors d’un seul passage du satellite au-dessus de la zone. Cette observation fine des océans ainsi que des zones côtières devrait aider à comprendre le rôle de ces petits tourbillons dans le climat, leurs interactions avec les grands courants océaniques et la présence de zones riches en biodiversité. Cette nouvelle observation ouvre de nouvelles perspectives dans l’étude des océans en approfondissant les interactions entre océanographie physique et productivité biologique ouvrant ainsi la voie à une meilleure gestion de l’environnement marin (ex. identification et création d’Aires Marines Protégées)[3].
Afin de rendre disponible le flux de données émis par SWOT auprès d’une large communauté scientifique et d’utilisateurs, les produits sont diffusés sur les plateformes Nasa Earthdata Search aux Etats-Unis et DataTerra en France. Pour l’hydrologie, le portail français Hydroweb.next, opéré par le CNES met à disposition des données hydrologiques aux utilisateurs en les combinant à diverses données, spatiales, mesures terrain, modèles numériques, drones etc… La plateforme AVISO (Archivage, Validation et Interprétation des données des Satellites Océanographiques) est dédiée quant à elle à l’exploitation des données altimétriques, issues des satellites qui mesurent la hauteur des océans. Basé à Toulouse et piloté par le CNES, le site web Aviso+ recense 20 ans de données en altimétrie. Aux États-Unis, la base PO.DAAC (Physical Oceanography Distributed Active Archive Center) de la NASA héberge les produits de données scientifiques sur l’hydrologie et l’océanographie de SWOT, ainsi que des produits de données océanographiques provenant d’autres satellites tels que Sentinel-6 Michael Freilich.
L’espace et l’océan sont deux infinis fragiles dont le destin va de pair. Dans le cadre de l’UNOC qui se tiendra à Nice en juin 2025, sous l’égide des Nations Unies, le CNES initie une alliance baptisée la Space4Ocean Alliance. Celle-ci vise à rassembler agences spatiales, agences gouvernementales et communautés scientifiques, pour, de l’amont à l’aval, mettre toujours plus la technologie spatiale au service des océans.
SWOT, aboutissement de 30 ans de collaboration entre la France et les USA
Dans les années 1980, afin d’analyser les perturbations océaniques, les scientifiques du CNES et de la NASA se penchent sur un concept d’altimètre capable de mieux connaître les océans et leur influence sur le climat. Cela donne lieu au programme TOPEX/Poséidon, suivi des satellites Jason 1 à 3 et Sentinel-6 Michael Freilich qui vont à leur tour enrichir les données existantes. Grâce à la recherche et au développement, il a été possible d’améliorer la performance de mesure altimétrique au-dessus des océans tout en accédant à la mesure de la hauteur des eaux de surfaces continentales tels que les lacs et les fleuves.
Menée conjointement par le CNES (Centre National d’Etudes Spatiales) et la NASA (National Aeronautics and Space Administration), la mission SWOT (Surface Water and Ocean Topography) permet de mesurer et de recenser 90% des eaux à la surface du globe, fournissant ainsi pour la première fois une cartographie haute résolution des ressources en eau de notre planète. Les mesures de hauteurs d’eau douce continentale et d’eau salée des océans fournies par le satellite contribueront à la mise en place d’études approfondies sur la gestion des ressources en eau et révolutionneront notre connaissance du cycle de l’eau à l’échelle mondiale, impacté par le changement climatique.
SWOT a été développé conjointement par la NASA et le CNES, avec la contribution de l’Agence spatiale canadienne (CSA) et de l’Agence spatiale du Royaume-Uni (UKSA). Le Jet Propulsion Laboratory (JPL), dirige la composante américaine du projet pour le compte de la NASA. Concernant la charge utile du satellite, la NASA a fourni l’interféromètre radar (avec une contribution de l’agence spatiale canadienne CSA sur l’émetteur haute puissance de KaRIn), un récepteur GPS, un rétroréflecteur laser, un radiomètre micro-ondes à deux faisceaux et a réalisé le module charge utile livré au CNES. La NASA a également fourni le système de lancement. Le CNES a fourni le système DORIS (Doppler Orbitography and Radioposition Integrated by Satellite), l’altimètre bi-fréquence Poséidon (développé par Thales Alenia Space), le sous-système radiofréquence de KaRIn (développé par Thales Alenia Space avec le soutien de l’agence spatiale du Royaume-Uni), la plateforme du satellite (sous maitrise d’œuvre industrielle Thales Alenia Space) et a développé le segment sol de contrôle du satellite. Le CNES est également en charge des opérations ainsi que du traitement des données transmises quotidiennement par l’instrument KaRIn et la NASA est également responsable du retraitement des données de l’instrument KaRIn.
[1] Pour en savoir plus : Les réservoirs sous le radar de SWOT | CNES
[2] Pour en savoir plus : SWOT au chevet des zones humides | CNES
[3] Pour en savoir plus : SWOT révèle des tourbillons par millions | CNES