L’Aéroport bien desservi, au cœur du développement économique des métropoles : l’exemple de Toulouse.
L’industrie aéroportuaire en mutation
Aujourd’hui l’industrie de l’aéroport est en perpétuelle mutation et vit un développement extrêmement fort dans toutes les villes du monde.
Avec plus de 3,8 milliards de voyageurs en 2016, ce développement est nourrit par une croissance de la population mondiale des classes moyennes, et l’association internationale du transport aérien (IATA) prévoit un doublement de ce chiffre d’ici à 2035.
Les compagnies aériennes low cost comme Easyjet ou Indigo drainent de plus en plus de monde, achètent des avions de plus grandes capacité, se lancent maintenant dans le créneau du long courrier, et comme les slots (couloirs aériens) sont saturés et que les aéroports ne sont ni extensibles ni facilement constructibles (on le voit bien à Notre Dame des Landes en ce moment), l’A380, gros porteur le moins polluant et le plus silencieux du monde, est de plus en plus plébiscité par les voyageurs, ainsi que par les compagnies qui se livrent une concurrence de plus en plus forte.
Face à l’augmentation croissante du nombre de voyageurs, (le trafic mondial double tous les 15 ans), l’industrie du transport aérien et les autorités se doivent alors de proposer des solutions pour optimiser la circulation des passagers et soutenir les aéroports, acteurs clés du développement économique.
Comme l’a fait remarquer à Toulouse, en novembre dernier, le Directeur général éxécutif d’Aéroports de Paris (ADP), Edward Arkwright, « l’aéroport c’est aussi de l’emploi, et l’industrie aéroportuaire peut croître sans faire croître les nuisances d’autant que d’ici à 2020 le bruit des avions aura baissé de moitié et que des recherches prometteuses sont en cours. Secteur majeur de l’économie, l’aéroport c’est 4000 emplois non délocalisables pour un million de passagers. Autant dire qu’il faut tout tenter pour donner aux aéroports le maximum d’atouts ».
Ces atouts sont essentiels car aujourd’hui les aéroports sont livrés à une redoutable concurrence. Leur statut monopolistique est de l’histoire ancienne et ce sont les compagnies low cost qui ont le pouvoir de décider si elles vont acheminer leurs milliers de passagers ici ou là en fonction non seulement du nombre d’habitants au kilomètre carré alentour mais aussi des services et infrastructures qui lui donneront la meilleure rentabilité possible. Des lignes de bus, de tramway et de métro reliant rapidement l’aéroport aux centres villes, des services utiles aux personnes qui voyagent pour affaire, des infrastructures de tourisme dynamiques, un nombre important de critères doivent être respectés pour ne pas perdre du terrain par rapport à la concurrence. Comme l’expliquait Edward Arkwright, lors de la journée solennelle de l’Académie de l’Air et de l’espace, « les liens avec les villes sont fondamentaux. L’aéroport dialogue plus avec les autorités de la mobilité, obligé de travailler plus étroitement avec elles, et beaucoup de travail reste à faire… »
Des nouvelles technologies
A l’heure où Star Alliance innove et s’allie avec Plug & Play pour offrir des voyages de plus en plus fluides, où tout tend à offrir à l’industrie du voyage un niveau supérieur, où des entreprises comme par Gemalto, leader mondial de la sécurité numérique, et IER, spécialiste du développement de solutions de libre-service à l’aéroport, s’associent pour offrir aux voyageurs aériens une expérience fluide et automatisée, pour répondre au besoin croissant d’un parcours qui accompagne les voyageurs de chez eux jusqu’à la porte d’embarquement de leur vol et où le voyageur peut s’enregistrer via son mobile ou une borne libre‑service à l’aéroport, accéder à des points de dépose bagages automatisés, passer le contrôle aux frontières ou aux points de passage sécurité et embarquement en toute autonomie pour gagner du temps, avec un parcours biométrique rapide et sécurisé dans l’ensemble de l’aéroport, on ne peut imaginer que les efforts que toute cette nouvelle technologie permet de faire en fluidité et gain de temps s’arrête sur un manque d’infrastructures rapides et aussi fluides à la sortie de l’aéroport.
L’étude Oxera « The continuing Development of Aircraft competition » indique qu’une coopération durable doit se faire avec « un large éventail de partenaires externes, tels que les autorités touristiques, les organismes d’investissements direct étrangers, les collectivités locales, et les gouvernements régionaux ou nationaux afin de vendre de manière efficace un aéroport aux compagnies aériennes, aéroport qui doit régulièrement évaluer et rechercher les caractéristiques et avantages de sa zone de chalandise. Les informations clés qui intéressent les compagnies aériennes comprennent la population vivant dans un rayon de 1 à 2 heures de l’aéroport, la façon dont ces personnes se rendent à l’aéroport, la démographie et la situation économique de cette population, les employeurs importants de la région et le type de connectivité internationale dont ils ont besoin, les points d’intérêts touristique et autres attractions spéciales. »
Toulouse relèvera-t-elle le défi ?
Une ville comme Toulouse, riche de 15 000 nouveaux arrivants par an, qui vient d’obtenir la médaille d’argent des mobilités ville-rail et transports urbains pour ses excellents résultats et son ambition en la matière, pourrait bien obtenir la médaille d’or ensuite si le dialogue entrepris avec les autorités économiques de la Haute Garonne aboutissait à un accord pour la construction d’une ligne directe Aeroport/Gare Matabiau, nécessaire d’autant que l’aéroport de Toulouse-Blagnac observe une croissance de 15% du nombre de ses voyageurs, avoisinant déjà cette année les neuf millions de passagers, et se trouvant, de surcroît au cœur du poumon économique de la Métropole, le quartier d’affaires aéronautique, qui draine des dizaines de milliers d’emplois chaque jour, dont des salariés qui ont du mal à accéder sereinement à leur lieu de travail, coincés matins et soirs dans les bouchons.
Ardent défenseur des entreprises, Philipe Robardey, président de la CCI de la Haute Garonne, suivi par les présidents de la Chambre de Commerce, le Médef, la CMA31, la CGPME, a saisi les collectivités locales cette semaine pour activer la mise en place de cette desserte Aéroport vers la Gare en rappelant qu’il faut anticiper les déplacements au vu de la progression attendue en 2042 d’une population métropolitaine toulousaine d’un million six-cent cinquante à un million huit cent mille habitants.
Philippe Robardey et les forces économiques du département ont demandé aux pouvoirs publics de considérer ce projet comme un investissement ambitieux sur un siècle et un avantage concurrentiel d’attractivité pour positionner Toulouse parmi les grandes villes européennes compétitives et non comme « une charge de fonctionnement ou d’exploitation à court terme » qui risquerait de donner envie aux grands comptes de s’installer ailleurs.
La Chambre de Commerce, le Médef, la CMA31, la CGPME, qui représentent les entreprises finançant 57% des recettes de SMTC avec 239 millions d’euros en 2016, travaillent de concert et dialoguent avec les pouvoirs publics pour que le monde économique local continue à se développer à Toulouse et alentours avec une desserte qui en complémentarité du tramway, transport agréable mais trop lent, apporterait un transport supplémentaire propice au climat des affaires, à la croissance, et par ricochet à l’emploi et donc aux recettes de transport supplémentaires.
Les entreprises, qui ont un rôle sociétal par rapport à leur environnement souhaitent contribuer à la baisse du bilan carbone par habitant, à la réduction de la pollution, au bien être de leurs salariés en réduisant leur stress, soutenant cette volonté de desserte en métro Aéroport/Gare Matabiau qui peut éviter la surdensification de Toulouse, permettant à ceux qui travaillent dans sa périphérie de regagner leur habitation à la campagne ou dans les villes voisines par le train. Cette ligne éviterait de construire plus de parking, d’immeubles, désengorgerait le périphérique, contribuerait à la réduction de la pollution tout en augmentant les emplois et les recettes de transports.
Le monde économique est convaincu que l’attractivité d’une ville ne fonctionnera que s’il y a de la fluidité dans ses déplacements, et Toulouse, qui est en concurrence avec Bordeaux -déjà équipée de la LGV (Ligne à grande vitesse)- doit s’assurer rapidement d’un autre moyen de développement de la Métropole pour relier son aéroport, son nouveau quartiers d’affaires Matabiau et son futur parc des expositions au reste du monde et notamment aux investisseurs qui arrivent le plus souvent à Toulouse par l’Aéroport et qui souhaitent gagner le plus de temps possible pour profiter d’une halte à Carcassonne ou d’un concert au Capitole.
Gilles Nakache, Président de la CGPME souligne que « si le rendez-vous est manqué aujourd’hui, il le sera pour les 50 ans qui viennent de façon irréversible. »
Avec la Métropole, les acteurs économiques ont imaginé des solutions alternatives de financement, par exemple en allongeant les durées de financement, en étudiant la possibilité de financement public/privé, toutes solutions allant vers une offre de déplacements performantes pour accroitre l’arrivée de nouveaux investisseurs et d’emplois comme l’ont déjà fait des villes ambitieuses à l’international comme Madrid, Newcastle, Bruxelles, Anvers, Copenhague, ou Alger par exemple.
Nadia Didelot pour AeroMorning.