Sécurité spatiale: L’espace risque l’arsenalisation. Faut-il le sanctuariser ? Est-ce politiquement possible ?
On en arrive à se demander si une seule vie suffira à Barack Obama pour remettre les Etats-Unis dans le droit chemin. D’autant que les dossiers qui exigent une décision difficile ou une profonde réorientation sont bien plus nombreux que ceux qui ont envahi les médias depuis quelques semaines. Pire, certains des problèmes à traiter donnent des sueurs froides, à commencer par les risques d’arsenalisation de l’espace et avec eux le sujet de la sécurité spatiale.
Cette expression barbare dit bien ce qu’elle veut dire. A savoir que la technologie permet désormais aux puissances militaires qui le souhaiteraient de positionner en orbite des armes offensives. Une éventualité qui suffit à justifier les réflexions en cours qui pourraient, devraient conduire à un traité international susceptible d’éviter une course aux armements spatiale. C’est, acronyme à retenir, le projet PAROS, Prevention of Arms Race in Outer Space. Si vous cherchez à entretenir vos angoisses de citoyen responsable et à réactiver vos insomnies, c’est exactement ce qu’il vous faut !
Les gens de bon sens appellent évidemment le PAROS de leurs vœux. Il a déjà été discuté en long et en large et des projets de résolution ont même été rédigés et soumis à l’approbation de l’assemblée générale des Nations unies. A chaque fois, le scénario est le même, à savoir l’expression d’un soutien très large, exception faite des Etats-Unis. L’administration Bush ne voulait pas entendre parler de PAROS, pas plus que du Traité de Kyoto. En clair, Washington a voulu, jusqu’à présent, conserver sa totale liberté d’action. C’est tout au moins la manière américaine de justifier ce refus.
La commission Défense de l’Académie de l’air et de l’espace vient de pencher sur ce thème, avec une compréhensible inquiétude (1). D’autant que les grands dangers à prendre en compte ne sont pas uniquement associés à un risque d’apocalypse planétaire. Ils concernent aussi les menaces liées à la prolifération de débris spatiaux en cas de destruction d’une arme placée sur orbite par un missile tiré de la surface de la Terre. Que ce soit en cas de conflit ou, tout simplement, si l’on ose dire, dans le cadre d’une simple expérimentation.
Les experts de l’Académie écrivent à ce propos que «la destruction de satellites par impact direct d’un véhicule tueur ou par charge explosive pourrait conduire rapidement à un volume de débris tel qu’il interdirait pour longtemps toute activité dans l’espace». Une éventualité qui fait d’autant plus peur que ses conséquences seraient sans doute irréversibles.
On est en droit de s’étonner que l’on parle relativement peu de cette épée de Damoclès absolue, d’apparence lointaine et abstraite. Aussi est-il heureux que l’Académie émette des recommandations claires, précises, accessibles aux politiciens. La première d’entre elles, primordiale : il faut élaborer un projet européen de traité international
interdisant toute action de destruction de satellites conduisant à la production massive de débris spatiaux. Par ailleurs, l’Europe devrait se doter d’un système de surveillance de l’espace et mettre en place des moyens de dissuasion spatiale capables de détecter toute agression. Ils pourraient être assortis d’un laser capable de neutraliser tout satellite mal intentionné.
Cette menace a l’aspect de la science fiction mais elle n’en a pas le goût. Il s’agit sans doute de l’un des dangers les plus graves qui guettent notre civilisation. Et, contrairement à la protection de l’environnement, il apparaît tout à fait incorrect d’un point de vue politique, voire tabou.
Bien sûr, le tintamarre de l’actualité quotidienne, souvent pitoyable, rend actuellement ce sujet invisible, inaudible. Il faudrait pourtant trouver le courage d’en parler.
Pierre Sparaco – AeroMorning
(1) «Pour une approche européenne de la sécurité dans l’espace», 64 pages, 15 euros, www.anae.fr
NDLR : Une nouvelle «tribune libre» est mise en ligne aujourd’hui, ainsi qu’une nouvelle intervention du médiateur d’AeroMorning. Les deux rubriques sont accessibles par la page d’accueil du site.
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